Quand on se lance dans la lecture de Véronique de Saint Vaulry, on entre dans un univers complet et entier. Logiquement je vais commencer la revue de ses ouvrages par le premier « logique », à savoir « Communiquer avec son cheval », les autres en étant un prolongement plus ou moins spécialisé (débourrage, gestion de la peur, etc).
Etant particulièrement sensible à ce type d’approche, le point de vue de VdSV m’était important, et je dois bien dire que je ne suis pas déçu. Toutefois quelques points particuliers me paraissent contestables voire erronés du point de vue scientifique. Nous allons voir tout cela de plus près…
Un manuel équestre pratique et accessible au débutant.
La première chose qui frappe lorsque l’on s’attaque à ce livre est le langage. Clair, simple précis, et surtout (enfin !) totalement expurgé de tout ce jargon « éthomagique » dont se gaussent bien trop de cavaliers qui ont choisi cette voie.
Ce style en fait un ouvrage parfaitement accessible et compréhensible pour un cavalier totalement formé (formaté ? – désolé irrésistible…) à la plus traditionnelle équitation de club. Ce point est important, car c’est très souvent ce jargon qui rebute les néophytes à la recherche « d’autre chose » avec leur cheval, et qui gagnerait à être utilisé dans les colonies de vacances où on pratique l’équitation…
[amazon_link asins=’2711420981′ template=’ProductLink’ store=’hippocampe-21′ marketplace=’FR’ link_id=’57975d8c-996e-11e8-90e5-8dab54cf75ee’]Autre point important, comme toujours chez VdSV, c’est un manuel pratique, qui propose des exercices concrets, cohérents et progressifs, tout en expliquant le « pourquoi du comment ».
La progression est logique, parfaitement respectueuse de la nature de notre compagnon cheval, et va de « lier l’amitié » à « pour progresser » en passant en revue un peu toutes les étapes, les outils, les systèmes d’aide possibles, y compris les toutes dernières techniques comme le « clicker training » (clic clic !)
Cette approche globale et pragmatique que nous fait partager cette championne de TREC répond à la problématique posée par le livre :
« Bien souvent, les cavaliers ne commencent à s’intéresser à la psychologie de leur monture qu’en cas de difficulté ! S’ils faisaient plus tôt l’effort de comprendre sa vie sociale, ses besoins, ses messages silencieux, ses peurs et ses motivations, ils découvriraient en lui des trésors de bonne volonté ! »
Chaque chapitre est précédé d’une introduction synthétique qui présente à la fois les fondements naturels et les objectifs du chapitre, ce qui rend la lecture et surtout la pratique des très nombreux exercices proposés particulièrement clairs, bien illustrés (photo ou schéma) et simple à mettre en œuvre.
Une équitation de contrats
Toute la logique de VdSV repose sur la notion de « contrat ». Parfaitement compréhensible par les chevaux, tous les exercices, attitudes proposés dans cet ouvrage font appel à la mise en place de contrats avec le cheval. Cela manque parfois du coté ludique introduit en équitation par Parelli mais ça a au moins le mérite d’être clair. Les nombreux exercices proposés permettent cette mise en place, amicalement, calmement, et finalement amènent à une certaine harmonie et complicité tant recherchése. Ce livre permet d’établir par conséquent des fondamentaux solides, et pour les connaisseurs, correspond « grosso modo » aux objectifs du 3ème niveau Parelli et la monte « Free Style ».
Après interviennent éventuellement les spécialisations par discipline (ou pas..), et pour cela je vous renvoie à Sandrine Dhondt
Les mots qui fâchent…
Bien que j’ai recours régulier, voire quotidien aux précieux conseils de VdSV, il y a dans ce livre, je ne vous le cacherai pas, des mots qui fâchent.
Le premier est le mot « punition ». Il m’a fait bondir et c’est le premier paragraphe du livre que j’ai lu en vociférant « scrogneugneu mais c’est pas vrai ! » pour finalement me raviser. Ce terme, totalement absent de mon équitation et de celle de nombreux autres cavaliers n’est en fait que le terme « classique » adapté à la compréhension des « non initiés » pour « se fâcher tout rouge », chose qui arrive avec un animal de 500 Kg ou plus qui ne « respecte pas le contrat ». Mais l’argumentation de VdSV sur le sujet se tient, reste dans les « normes » éthologiques, et jamais elle ne préconise la moindre violence ou agressivité. Toutefois quand notre sécurité est en jeu il faut savoir réagir, tel pourrait être un bon résumé.
L’autre qui fâche (beaucoup !) est tout le chapitre concernant la monte sans mors. En résumé, il ne serait PAS possible de parvenir à une belle équitation sans mors car cela supprime toute possibilité de mobilisation de la mâchoire, indispensable à l’attitude haute du cheval en dressage haute école. Pour preuve, un fait ostéopathique réel : l’avancée de la mâchoire inférieure par rapport à la supérieure dans le rassembler notamment. (D’où le crucial problème de ne pas avoir de problème de dents qui pourrait bloquer ce processus).
Alors je vais me permettre, chère Véronique, de vous conseiller de changer d’urgence d’ostéopathe car une analyse scientifique de base permet de constater que ce problème est justement dû à la présence du mors ! Et que par conséquent, comme en témoignent d’innombrables cavalier(e)s qui font de la « belle équitation » sans mors (dont je tente de faire partie…), la mobilité de la mâchoire n’est plus un problème dès lors qu’il n’y a plus de mors, le cheval n’ayant à aucun moment besoin de lutter contre (réflexe d’opposition/cession de la mâchoire). Et de fait c’est de sa décontraction globale que l’on observe une souplesse naturelle de la mâchoire…
Je vous renvoie à cet article – Cession de la mâchoire et monte sans mors – pour une argumentation scientifique plus solide.
J’avoue également, car cela ne correspond en rien à ma modeste expérience, que l’omniprésence des notions de dominance, d’ordre, d’ascendant sur le cheval me laisse perplexe. Je crois que ça peut être une étape, mais qu’il est possible et facile d’aller bien plus loin. A condition d’avoir une vraie et bonne connaissance du cheval. Hempfling ou Linda Kohanov nous l’ont prouvé.
Et ceux qui réjouissent !
Dans ce livre VdSV fait un plaidoyer lourd contre les abus actuels de tout un tas de choses, notamment les mors, les muserolles mais aussi les licols corde « éthomagiques » et autres ennasures qui au final sont parfois plus génératrices de souffrances et douleurs que les mors légèrement utilisés. Ce chapitre est assez réjouissant car il remet un peu à leur place les gourous et autres « détenteurs de vérité » qui ne font que donner bonne conscience (moyennant généralement grosses finances…) mais qui produisent tout le contraire de l’effet prétendument recherché. Dans ce chapitre tout le monde en prend pour son grade, et on reconnait la ce rapport pragmatique mais si respectueux du cheval que professe Véronique de Saint Vaulry.
Pour conclure cette (trop ?) longue revue, un remerciement s’impose pour la mise à disposition du grand public d’un ouvrage aussi accessible, porte d’entrée dans le monde merveilleux de la relation vraie au cheval…
En un mot, un manuel de référence !
Lire Communiquer avec son cheval :
Véronique de Saint Vaulry ne fait pas du tout partie des « nouveaux maîtres », ou du courant chuchoteurs. Son approche elle l’a développée au fil des ans, grâce à sa pratique de l’équitation d’extérieur (en TREC). Son approche car ce n’est pas une « méthode » est emprunte de réalisme, de bon sens, et d’un profond respect du cheval. Donc oui forcément elle semble faire de « l’équitation éthologique », mais elle n’a pas attendu Parelli et les autres pour le faire. C’est une de ces remarquable « femmes de cheval » pour qui le cheval passe avant tout objectif technique ou disciplinaire.
Visiter son site : http://www.saintvaulry.com/
Morceaux choisis
Il est de plus en plus fréquent de rencontrer des cavaliers qui refusent totalement l’idée de faire subir quelque chose de désagréable à leur cheval. La vue d’une cravache les révulse, l’idée de punition leur fait horreur. Aussi se précipitent ils avec passion sur les « nouvelles méthodes », lorsque leur promoteur de celles-ci a l’habileté de les présenter comme douces et naturelles, et d’insister sur l’absence de punition. Sauf dans le cas bien particulier du clicker training, un tel discours est une escroquerie. (p 19)
L’équitation commence à pied.
C’est à pieds que s’établit la relation hiérarchique. Or impatients de faire de l’équation, nous commettons l’erreur de bâcler les moments passés aux cotés de notre monture. (p 29)
Le cavalier ne peut imposer tout et n’importe quoi à sa monture : outrepasser les limites du raisonnable, c’est courir au conflit.
Apprendre à se passer du contact.
Des milliers de cavaliers gardent le contact de la première à la dernière minute passée en selle. Ils ont tort. […] Car il est parfaitement possible de monter à cheval en toute finesse sans le moindre contact (p 115 – en gras dans le texte)
un must-have en effet, un indispensable même :)
Et ses autres livres aussi !!!
C’est le livre qui m’a ouvert les yeux. Toujours à mon chevet !